Diagnostic, prise en charge... Le point sur les troubles bipolaires avec le Dr Christian Gay, psychiatre à la clinique du château de Garches et cofondateur de l'association France Dépression.
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Une comédie musicale pour aider d'autres malades à remonter la pente.
Troubles bipolaires : tel est le titre de la comédie musicale qui sera créée dimanche à l’Espace Ried Brun par Ralph Burdloff, un coiffeur atteint par cette maladie.
Dimanche 13 avril à 13 h 30 et 16 h 30, l’association Sucrés c’allez, présidée par Rachel, présentera la comédie musicale Troubles bi-polaires, dans la salle de l’Espace Ried Brun à Muntzenheim. À travers ce spectacle musical et théâtral, Ralph Burdloff, coiffeur au Jardin de Colmar à Holtzwihr, atteint de troubles bipolaires de type 1 depuis l’âge de 19 ans, souhaite passer un message dans le but d’aider les autres malades en détresse, leurs familles ainsi que la société en général. C’est aussi dans ce but que Sucrés c’allez a vu le jour.
Une bonne trentaine de bénévoles évolueront sur scène sous la direction de Ralph Burdloff.
Aujourd’hui, Ralph, directeur artistique, est entouré d’un comité dynamique et d’une troupe tout acquise à la cause. Une bonne trentaine de bénévoles évolueront d’ailleurs sur scène. « Sans Barbara Touchais, la chorégraphe, et Sylvain Deletang, le régisseur du Ried Brun, je n’aurais jamais pu composer ce spectacle » souligne Ralph Burdloff avant de faire les éloges du maire Bernard Gerber, également président du Pays du Ried Brun, et du conseil municipal pour leur soutien au niveau de la mise à disposition gratuite des salles pour les répétitions ainsi que de la salle de spectacle. Quatre des plus belles voix de la région apporteront leur soutien à cette maladie tout comme les danseurs de Break Dance Hip hop de Colmar. L’écrivain du livre Entre gloires et désespoirs, actuellement en préparation, Muriel Jullien, de Colmar, interviendra également. Les décors et costumes de Cathy Durand, qui fait aussi partie de la logistique, donneront à ce spectacle une palette de couleurs chatoyantes et pleines de grâce.
Source : L'Alsace et DNA du vendredi 11 avril 2008
Un collectif d’associations organise le «Mois du cerveau»: une exposition et des conférences, à Mulhouse. Pour faire mieux connaître les maladies mentales, souvent stigmatisées. Pour rompre l’isolement des patients et de leurs familles.
Les maladies mentales sont beaucoup plus fréquentes qu’on le pense : une personne sur quatre sera concernée à un moment de sa vie. Elles sont aussi le handicap le plus stigmatisé. « Pour deux raisons principales, explique le Dr Yann Hodé, psychiatre praticien au centre hospitalier de Rouffach. D’abord, la non connaissance des mécanismes biologiques sous-jacents aux troubles : on dit "C’est dans la tête…". Ensuite, par manque de familiarité, de contact avec les personnes malades, ce qui donne lieu aux idées les plus fausses, les plus arrêtées et les plus stigmatisantes. » Ainsi, emploie-t-onles mots "autisme" et "schizophrénie" à tort et à travers, dans des contextes et avec un sens qui n’ont rien à voir avec la réalité de ces maladies. « Les gens, à la fois croient savoir, et ont peur de savoir », constate le Dr Hodé. Il faut donc vulgariser, informer, changer le regard des uns, déculpabiliser les autres.
Les familles vivent souvent un enfer
Car la stigmatisation a des conséquences sociales dramatiques pour les personnes malades et leurs proches. « Le pire, c’est l’isolement. Les familles vivent souvent un enfer », témoigne Brigitte Carraz, directrice de l’association Marguerite-Sinclair à Mulhouse. Toutes les études montrent en effet que seul, on ne peut pas s’en sortir, et que faire partie d’une association est toujours positif. « Mais quand on est malade, c’est une démarche intellectuelle très difficile de rejoindre une association », souligne Denis Macher, membre d’Argos 2001, qui regroupe des patients souffrant de troubles bipolaires (maniaco-dépressifs).Le Mois du cerveau, du 1er au 30 avril à Mulhouse, permettra non seulement, grâce à une exposition et une série de conférences (voir programme), de mieux comprendre ces troubles — aussi divers que les maladies d’Alzheimer ou de Parkinson, l’épilepsie, la schizophrénie, les accidents vasculaires cérébraux, la dépression, l’autisme, etc. — mais également de donner de la visibilité aux associations. Une simple présence, une écoute, une main tendue peuvent parfois rendre supportable l’insupportable.
Source : Julie Keiflin, L'Alsace du dimanche 30 mars 2008
Mercredi 16 avril, 20 h (Auditorium du Centre de Réadaptation,
57 rue Albert-Camus, Mulhouse) :
« La dépression, la connaître et s’en sortir »
par le Dr Christine Mirabel-Sarron, psychiatre au Centre Hospitalier Sainte-Anne à Paris
Mercredi 23 avril, 20 h (salle de la Décapole, Hôtel de Ville, place de la Réunion, Mulhouse) :
« Stigmatisation et maladies mentales »
par Christian Guinchard, sociologue et maître de conférence à l’Université de
Franche-Comté, Laboratoire de sociologie et d’anthropologie de Besançon
Ouvert à tous, entrée libre.
A 56 ans, je suis soignée depuis cinq ans pour maladie mentale. Cinq psychiatres différents ont diagnostiqué, l'un une hypomanie, l'autre une personnalité maniaco-dépressive, le suivant une dépression profonde pouvant me conduire au suicide. Chaque fois, je suis enfermée plusieurs semaines dans un hôpital psychiatrique, avec des traitements très forts que je désapprouve. Que faire pour éviter ces pratiques et m'en sortir ? Christiane L. Dompierre.
La bipolarité, ou maniaco-dépression, est une succession de phases d'excitation psychique (hypomanie) et de dépression, ponctuées de périodes de stabilité plus ou moins durables : la souffrance engendrée par l'instabilité de l'humeur est bien réelle et ses effets peuvent être ravageurs. Vous avez été hospitalisée pour ne pas vous mettre en danger. Les traitements prescrits sont des régulateurs destinés à soigner et à prévenir ces tempêtes affectives destructrices. Une fois stabilisée, vous vous pencherez sur vos problématiques psychiques profondes et sur la mise à nu de difficultés existentielles souvent très anciennes : soit à l'aide d'une psychothérapie réalisée avec un praticien formé aux thérapies comportementales et cognitives (reconnues pour leur efficacité à prévenir les récidives dépressives), soit par une psychanalyse. La qualité de l'écoute est essentielle. Vous pourriez également pratiquer le yoga ou la relaxation pour vous sentir mieux. Parlez-en au psychiatre qui vous suit, il saura vous orienter vers la méthode adéquate.
Source : Votre courrier - Version Fémina n° 309 du 28 février 2008
Formes diverses, symptômes sournois et effets ravageurs : la dépression est en passe, selon l’OMS, de devenir la deuxième affection dans le monde d’ici 2020. Il est plus que jamais urgent de cerner les causes et de recenser les traitements possibles de cette maladie encore trop souvent taboue.
Lorsque l’euphorie est excessive, dure des mois et fait place sans crier gare au désespoir le plus profond, on est en présence d’un trouble maniaco-dépressif, encore appelé bipolaire. Comment vivre avec des troubles maniaco-dépressifs ?
Comment vivre avec des troubles maniaco-dépressifs ? Lena, Jakob et Sandra décrivent leur lutte contre une maladie qui les propulse de phases d'excitation extrême en phases de dépression absolue.
Une humeur avec des hauts et des bas, chacun connaît cela. Mais lorsque l'euphorie est excessive, dure des mois et fait place sans crier gare au désespoir le plus profond, on est en présence d'un trouble maniaco-dépressif, encore appelé bipolaire. L'origine exacte de la maladie reste à ce jour inexpliquée, mais on sait que le facteur génétique joue un rôle important. Trois patients témoignent ici de l'impossibilité de mener une vie équilibrée lorsqu'on est atteint de cette maladie toujours très tardivement diagnostiquée. C'est le cas de Sandra, étudiante, soignée depuis dix ans exclusivement pour dépression, parce que ses épisodes maniaques n'avaient pas été repérés. Désormais, Sandra apprend à "combattre les extrêmes". Lena, elle, vit loin du monde dans un petit village de Bavière avec son mari et ses trois enfants, accrochée à un rythme de vie le plus régulier possible car, dit-elle, "tout événement imprévu, positif ou négatif, peut déclencher chez elle une réaction". Dans ses phases maniaques, Lena a défoncé des portes, quitté sa famille, mis sa vie en danger. Pendant ses épisodes dépressifs, elle a essayé plusieurs fois de se suicider. Pour ses enfants comme pour son mari, cette alternance est "un enfer". Enfin, Jakob, qui vit avec ses troubles bipolaires depuis vingt-sept ans, estime que toute sa vie a été bouleversée par cet effet de yo-yo perpétuel. "Sans cette maladie, j'aurais fait des études et probablement créé mon entreprise, mais durant mes phases dépressives et maniaques je détruisais systématiquement ce que je venais de construire." Pourtant, comme celui des deux autres patients, le récit de Jakob montre qu'il n'abandonne pas la lutte contre la maladie.
Le professeur Bräunig est médecin chef de la clinique psychiatrique "Humboldt-Klinikum"
à Berlin. D’après son expérience, la meilleure thérapie de base consiste
à expliquer précisément au patient quelles sont les particularités de son
affection.
ARTE : Le terme « dépression » est aujourd’hui
tellement galvaudé que les patients atteints de cette affection sont souvent
jugés « fragiles » et non « malades ». Mais quelle est
la différence entre un trouble de l’humeur et une véritable dépression ?
Les humeurs dépressives, la tristesse ou la souffrance font partie de la vie et
ne sont donc pas nécessairement pathologiques. Cela dit, il existe de
nombreuses formes de dépression qui, de par leur structure et leurs symptômes,
se démarquent clairement de simples passages à vide. Prenez par exemple les dépressions
bipolaires, autrefois appelées psychoses maniaco-dépressives :
contrairement aux petites déprimes, elles n’émanent pas directement d’un
trouble de l’humeur « normal » et se manifestent souvent de manière
très violente, sans motif apparent. Les personnes atteintes de dépressions
pathologiques ont souvent des symptômes physiques ; leurs pensées, leur
vie émotionnelle et l’expression de leur visage changent – même leurs
mouvements sont totalement différents. C’est dans ce contexte que surgissent
angoisses et pulsions suicidaires. Une grave dépression peut donc mettre en péril
la vie des patients.
Selon les estimations, moins de la moitié des dépressions font
l’objet d’un diagnostic correct. Pourquoi ?
Même si les médecins non spécialisés en psychiatrie savent de plus en plus
de choses sur la dépression, leurs connaissances des troubles bipolaires
restent insuffisantes. Et pourtant, ces deux maladies sont fondamentalement différentes,
tant au niveau du pronostic que du traitement des patients. A première vue, une
dépression bipolaire est difficile à diagnostiquer, notamment en l’absence
de manie ou d’hypomanie. C’est sur la base d’autres indices qu’un spécialiste
identifiera cette affection – par exemple des antécédents familiaux ou des
symptômes maniaques isolés. De même, les dépressions lourdes qui
apparaissent chez les jeunes patients sont le signe de troubles bipolaires. Les
personnes fréquemment au contact de ces malades finissent par identifier un schéma
typique : les sujets sont émotionnellement très instables, indépendamment
des phases dépressives ou maniaques.
Le sexe et l’âge des patients influent-ils sur l’intensité des
symptômes ?
Certainement, ce qui ne facilite pas le diagnostic. L’affection bipolaire
s’exprime différemment chez l’enfant et l’adolescent ou le jeune adulte
et les personnes plus âgées. Chez l’adolescent notamment, il est très
difficile de faire la différence entre l’instabilité propre à cet âge, une
crise de puberté ou des troubles déficitaires de l’attention. A un âge plus
avancé, les symptômes de la maladie sont souvent accentués par des troubles
mentaux alors considérés comme « normaux ». En raison des cycles
qu’elles traversent (grossesses et accouchements), les femmes sont plus
souvent sujettes aux dépressions. Les hommes qui souffrent de manies ont quant
à eux un comportement plutôt agressif et addictif.
Il est possible de traiter les dépressions pathologiques grâce aux médicaments.
Peut-on pour autant parler de guérison ?
Non. Pour l’heure, il est impossible de parler de véritable guérison. Cela
dit, nous disposons de moyens efficaces pour atténuer les symptômes et prévenir
les rechutes. Les intervalles entre les crises peuvent être rallongés et la
durée des épisodes raccourcie. Nous supposons également qu’un traitement précoce
est susceptible d’améliorer le pronostic global. Il ne faut donc pas attendre
que la situation devienne inextricable.
Nombreux sont les patients qui rechignent à suivre un traitement médicamenteux…
Lorsqu’une personne est victime d’un infarctus ou d’une attaque cérébrale,
le recours aux médicaments est une évidence. En revanche, on tend à oublier
que le cerveau est le théâtre des phénomènes psychiques. Lors d’une dépression,
on observe une baisse du nombre de neurotransmetteurs dans certaines régions cérébrales ;
en cas de manie, d’autres substances sont présentes en quantité supérieure.
Dans le traitement des manies, le blocage de neurotransmetteurs s’avère
particulièrement efficace et utile pour le patient. Pour les dépressions, la
situation est un peu plus complexe, même si la pharmacothérapie antidépressive
a de l’effet. On obtient les meilleurs résultats en combinant médicaments et
psychothérapie. Comme pour les autres maladies en général, la médication
seule n’est pas la panacée.
Les antidépresseurs ne rendent pas « dépendants ». Faut-il
pourtant adopter une autre hygiène de vie ?
A l’instar des diabétiques insulinodépendants, les patients souffrant de
troubles bipolaires sont « dépendants » des antimaniaques, des
antidépresseurs ou d’autres médicaments contre les rechutes. Cela dit, ils
ne développent aucune addiction. Par ailleurs, il faut inciter les patients à
gérer leur maladie de manière autonome. Ils doivent puiser en eux-mêmes les
ressources nécessaires pour guérir et limiter ainsi la prise de médicaments.
Ce traitement permet aussi d’éviter une modification de la personnalité débouchant
sur certains troubles comme l’anhédonie ou la tristesse.
Quel est l’objectif des thérapies d’accompagnement des troubles
bipolaires ?
D’après mon expérience, la meilleure thérapie de base consiste à expliquer
précisément au patient quelles sont les particularités de son affection.
C’est pour lui le seul moyen de se préparer à temps aux modifications et de
développer des mécanismes de protection. Les problématiques étant très
variables, il n’existe pas de psychothérapie type pour les patients
bipolaires. Les thérapies cognitives sont très utiles lorsque les patients
s’enferment dans des logiques d’angoisses dépressives. Les traitements
chronobiologiques ont quant à eux fait leurs preuves en cas de phases
d’euphorie et de déprime très prononcées ou d’instabilité. De même,
l’expérience a prouvé qu’une vie très réglée – prise de repas à des
heures fixes, horaires de sommeil réguliers, etc. – avait un effet bénéfique
sur les patients bipolaires.
La société de la performance dans laquelle nous vivons serait-elle en
partie responsable de l’augmentation du nombre de troubles bipolaires ?
Je suis certain que notre environnement professionnel et la société de la
performance ont une incidence sur le développement des dépressions
unipolaires. C’est moins le cas pour les troubles bipolaires. Bien sûr, on
peut y voir un « signe de notre temps », mais il est peu probable
que les conditions de vie actuelles entraînent une augmentation du nombre de
troubles bipolaires. Dans des phases maniaques ou hypomaniaques, les patients
bipolaires sont particulièrement performants. De tout temps, ils ont été des
éléments moteurs de notre société – pensez à Van Gogh, Schumann,
Baudelaire, Virginia Woolf, Hemingway, etc. Si l’on parle aujourd’hui
davantage de cette maladie, c’est parce que la société est devenue plus
sensible au vécu des personnes souffrant de troubles bipolaires.
Propos recueillis par Nicola Hellmann
Source : http://www.arte.tv